Rituale Lugdunum Fest V : Quand Lugdunum Pue La Sulfurie !

Chiaroscvro ✘ Decline Of The I ✘ Les Chants de Nihil ✘ Hegemon
Les Ombres Triomphent à Lugdunum

La Ville aux deux fleuves s'est changée en cloaque. Le 27 Septembre 2025, la messe noire lyonnaise du Rituale Lugdunum Fest V a déversé son venin dans les veines anesthésiées de Bron, au Jack Jack. Oubliez la fête de la lumière, on est ici pour célébrer les ombres et l'antimodernisme militant. Cinquième offrande aux dieux du Chaos, ce festival n'est pas un simple concert, c'est une évocation sous le signe du blast beat et du nihilisme. Le Jack Jack, transformé en temple de l'abjection par l'équipe de Kaonoir, sentait déjà la sève des guitares dès l'ouverture des portes. L'atmosphère, lourde comme un linceul gorgé d'eau, annonçait l'immersion totale dans les abysses de la psyché. Quatre formations françaises, quatre visions du Black Metal, étaient prêtes à nous arracher l'âme à coups de hache philosophique. La machine à laver l'âme est en marche. On est là pour se faire démolir, et on adore ça.
La Quarantaine Du Mouroir : 8 Minutes Et 42 Secondes De Cécité
Le rituel s'ouvre, non pas sur un blast, mais sur l'obscénité visuelle et sonore d'une Projection Exclusive. Le Dark Project français, Eros Necropsique, nous a jeté son clip inédit, "En Quarantaine", extrait de l'album "Dépression" sorti en mai 2025. C'est la suite sombre et antagoniste de leur précédent opus, Plénitude Éphémère. Pendant 8 minutes et 42 secondes, le Jack Jack s'est tu, hypnotisé par cet avertissement : "POUR PUBLIC AVERTI".
C'est là que le rock gothique français prend tout son sens : une poésie macabre à la Lautréamont, où chaque mot est une saignée. Le morceau est l'essence même de l'échec et de la solitude, une confession de la tombe. Nous avons tous entendu cette voix spectrale qui nous chuchotait l'indicible : "À jamais fracassé, / À jamais déconstruit. / Voué à demeurer. / Prostré, en quarantaine.". Une entame de festival qui n'est pas une mise en bouche, mais un trou béant dans la tête, annonçant que ce soir, le seul amour sera celui de son propre vide.
CHIAROSCURO : Le Clair-Obscur qui Te Fouette l'Âme
Les Lyonnais de Chiaroscvro (Clair-Obscur, pour les latinistes du fond) ont ouvert les hostilités, et putain, quelle entrée en matière ! Nés en 2020, ils sont le sang neuf de la scène locale, mais avec une maturité qui pèse comme le granite. Leur Black Metal, chanté en français, est imbibé des influences des années 90, mais aussi d'une certaine théâtralité, puisant dans le baroque et le romantisme.
Leur set a été un tourbillon. Riffs assassins, mélancolie destructrice, et une intensité brute. Ombra le chanteur, crachait sa révolte comme un sermon. J'ai senti la salle aspirée par leur énergie.L'assaut a été total, puisant dans leur répertoire sombre et Antimoderniste. On a senti les murs trembler sous le poids des thèmes qu'ils vénèrent – la Mort, la Solitude, l'Après-vie. Le public, ravagé par le tourbillon de colère, s'est pris l'intégralité de la haine froide. Des titres comme "ORAISON" à "ULTIME RÉVÉRENCE" (selon la liturgie des damnés), la performance fut fidèle à la promesse : dChants de Nihiles riffs assassins et une atmosphère de fin du monde. Le public, local et fier, a répondu présent, accueillant chaque salve de riffs avec une ferveur démentielle. Chiaroscvro a frappé fort, prouvant que les monstres surgissent bel et bien du clair-obscur, et ils sont prêts à tout ravager. C'était leur rituel de consécration à domicile.
DECLINE OF THE I : La Neurobiologie du Chaos
L'entité parisienne Decline Of The I, menée par l'énigmatique A.K. (également connu pour ses activités dans Merrimack et Neo Inferno 262), a pris possession de la scène. Ici, on ne fait pas dans la simple rage : on dissèque l'être humain avec une froideur clinique.
Après une trilogie d'albums basée sur les travaux du neurobiologiste français Henri Laborit (un truc qui te fait chauffer le cortex !), leur dernière sortie, « Johannes » (chez Agonia Records), a marqué un virage, s'inspirant cette fois-ci du philosophe et théologien danois Kierkegaard. Le cap est maintenu dans le nihilisme et le pessimisme profond. A.K. aime explorer les recoins les plus sombres de la conscience. Les interviews récentes confirment cette quête d'un Black Metal qui va au-delà des codes, une vraie expérience de pensée.
C'était un set tortueux et rampant. Le Post-Black de Decline Of The I n'est pas là pour te donner des réponses, mais pour te poser des questions existentielles, en braquant les projecteurs sur tes propres tourments. Musicalement, c'est un condensé noir, parfois dissonant, toujours hypnotique. La voix d'A.K. est un hurlement de détresse intellectuelle. Les musiciens, ont créé une ambiance déshumanisée et chirurgicale, parfaite pour accompagner cette exploration de l'inconscient. Le public était en transe, la tête dans le cosmos du désespoir. Ce n'est pas un concert, c'est une séance de thérapie inversée : un rappel brutal que l'enfer, c'est peut-être... nous ! Leur prestation est d'une technicité irréprochable au service du chaos.
LES CHANTS DE NIHIL : La Fureur Bi-Polaire De L'ouest
Le feu a continué de ravager le Jack Jack avec les Bretons des Chants de Nihil. Le groupe se définit par un Black Metal "bi-polaire", et c'est cette folie schizophrénique qui a tout emporté. Leur musique ? C'est le miroir de l'âme torturée qui passe « de la malaisance jusqu'au sabordage ». Le guitariste/chanteur Jerry a déjà confirmé que les périodes d'arrêt leur ont permis de se recentrer, et l'onde de choc sur scène est la preuve que ce recentrage a donné un Black Metal encore plus cinglant.
Leur setlist fut un manifeste de leur nihilisme. "Entropie des Conquêtes" a ouvert le carnage, un maelström de riffs qui nous rappelle que toute œuvre est vouée à la destruction. Des titres comme "La Crue", "Le Tyran & l'Esthète" ou "Ma Doctrine, ta Vanité" ont souligné la dualité stérile de notre existence. Chaque morceau était une exploration de l'inconscient, un hurlement sous la bannière de la destruction. Le quatuor a distillé sa litanie sombre avec une justesse et une intensité incroyables. Le Black Metal des Bretons est tortueux, parfois dissonant, toujours émotionnellement dense. On parle de leur côté "bi-polaire" aussi, mais celui-ci touche aux extrêmes de l'euphorie et du sabordage. L'atmosphère est devenue lourde, oppressante, mais paradoxalement libératrice. Les riffs s'entrecroisent pour former un mur de son dense et impénétrable. Sur scène, l'attitude est sombre, concentrée, mais chaque mouvement, chaque regard sous les projecteurs minimalistes, contribue à l'hypnose. Ils ont pris la salle en otage, nous forçant à contempler l'abîme qu'ils ont si bien dépeint sur leurs disques. Une leçon de Black Metal qui parle à notre part d'ombre la plus inconsciente.
HEGEMON : L'Ode Maléfique à l'Annihilation
Et pour achever nos âmes, les vétérans de Montpellier, Hegemon, ont clôturé ce rituel. Fondé en 1996, le groupe est une institution du Black Metal français, et leurs lives sont, avouons-le, rares. Leur présence était l'événement exclusif de cette soirée, l'aboutissement du pèlerinage pour beaucoup.
Leur dernier monument noir, « Sidereus Nuncius », est sorti en 2021 via Les Acteurs de l'Ombre Productions. Ce disque a réaffirmé leur statut, avec un Black Metal racé et sauvage, aux mélodies imparables. Leurs interviews après cet album soulignent une volonté d'exprimer les tourments nihilistes du groupe et une certaine vision de l'annihilation. Le groupe a aussi connu quelques changements de line-up au fil du temps (notamment au poste de batteur), rendant chaque apparition scénique encore plus précieuse. Ils ont des soldats de l'ombre à défendre !
L'attente était palpable, et dès les premières notes, le Jack Jack s'est transformé en champ de bataille. Le son était massif, la frappe chirurgicale et les guitares délivraient ces mélodies sombres et addictives qui sont leur marque de fabrique. C'est du Black Metal puissant, direct, qui a la capacité de te basculer sans préavis dans l'obscurité. Les morceaux de « Sidereus Nuncius » ont pris une nouvelle dimension en live, avec une fureur contenue mais omniprésente. La salle a rugi lorsque le groupe a asséné le titre emblématique "By This" (tiré de l'album By This, I Conquer de 2002), un serment gravé dans la chair. Des titres comme "Heimarmene", "Warfare Unleashed" et la reprise d'Immortal ont fait de cette prestation, d'une puissance et d'une rareté absolues, une leçon d'histoire sanglante et une méditation sur la destruction. Hegemon, avec une maîtrise scénique indiscutable, a prouvé pourquoi leur culte est si fort : ils ne font pas juste de la musique, ils offrent une transcendance musicale, faisant de chaque auditeur un « soldat de l'ombre prêt à se battre ». Le set, mené de main de maître, a été un climax violent et parfait pour clore cette nuit de rituels.
Conclusion : Gloire à Kaonoir et au Sang versé !
Le Rituale Lugdunum Fest V a tenu toutes ses promesses, ce n'est pas juste une date dans l'agenda, c'est une cicatrice: une programmation 100% française, 100% Black Metal, 100% défonce. De la sauvagerie locale de Chiaroscvro à la froideur intellectuelle de Decline Of The I, en passant par les litanies de Les Chants de Nihil, jusqu'à la puissance implacable des têtes d'affiche Hegemon, on a eu droit à une nuit sans concession. Ces groupes français ont prouvé une fois de plus que notre scène est non seulement vivante, mais porteuse d'une violence intellectuelle et sonore qui n'a rien à envier aux plus grands
Les organisateurs de Kaonoir ont encore frappé un grand coup en offrant une niche de qualité dans le paysage festivalier. Le Jack Jack, notre bunker de l'extrême, a vibré sous le poids des riffs et des âmes torturées.
Je repars avec un bourdonnement dans les oreilles et une vision plus sombre du monde. Mission accomplie. Vivement le volume VI. Gloire au Jack Jack, gloire à Kaonoir, et que la dépression soit notre guide.
Xylia vous salue, et n'oubliez jamais : Restez dans le noir ! HAIL SATAN et surtout, HAIL LE BLACK METAL FRANÇAIS !
Xylia pour Yog Sothoth Photography !























































































